- Oh, oui, vous avez dû trouver porte close samedi dernier. Une semaine de fermeture pour les vacances de Pâques, mais nous avions mis un papier sur la porte, non ? Voilà, je vais vous faire visiter tout de suite, juste le temps traiter les quelques personnes qui attendent. Forcément, avec une semaine de fermeture, cela crée un goulot d'étranglement et c'est un peu le coup de feu, en ce moment. Je vous laisse jeter un oeil par vous-même, et j'arrive.
Je laisse le sympathique barbu à son bureau, à l'entrée de la salle, et m'enfonce vers les rayons de la médiathèque de l'Institut Français, l'oeil brillant de gourmandise. Oh, la pièce n'est pas bien grande, de la taille d'une honnête librairie de quartier, mais cela représente tout un alignement de promesse pour mon séjour allemand. Une généreuse collection de littérature, un très bel échantillon de DVD, et il y a même des CD. Bien entendu, tous les auteurs sont français, mis à part quelques francophones, mais je retrouve ici le plaisir de naviguer dans une médiathèque, ces confiseries pour amateur d'oeuvres et de culture.
- Bon, je vois que vous avez repéré les DVD. Il faut fouiner : comme les prêts ne sont autorisés que pour une durée d'une semaine, le roulement est extrêmement important, et nous ne sommes jamais parvenus à maintenir un classement stable. Mais, en contrepartie, vous avez le plaisir de la découverte et de l'imprévu ! Là, la toute première étagère, ce sont les dictionnaires, qui, bien entendu, ne sont pas en prêt. Ensuite, vous avez l'actualité littéraire, puis les rayons de littérature, classés par ordre alphabétique. Sur le mur du fond, la littérature thématique, classée par sujet, vous pouvez retrouver les cotes dans le lutin posé sur la table du fond. Sur la gauche, les CD, avec quelques compilations, et puis aussi un tout petit peu de musique classique. Derrière, les documentaires, avec encore beaucoup de cassettes vidéos, mais peut-être n'avez-vous pas de lecteur. La littérature sur cassette et CD, pour ceux qui n'ont pas le temps de lire. Sur la droite, vous avez les bandes dessinées adultes, et puis les espaces jeunesses. Il faut parfois penser à piocher dans cet espace jeunesse, par exemple pour les classiques de bande dessinée, Lucky Luke, Tintin, Gaston. Ca fait toujours du bien, un bon Gaston ! Bon, et puis, dans les romans adolescents, il y a aussi de belles choses. Mais je vais vous laisser explorer par vous-même.
Je butine les bandes dessinées, caresse les couvertures de livres aux titres tous en français, puis plonge dans les DVD, dont la variété est impressionnante. On retrouve les grosses machines françaises, de De Funes au Père Noël est une Ordure, en passant par les deux épisodes de la Boum. Mais les films d'auteur sont présents en nombre, doubles DVD de Godard, Truffaut, Belle du Seigneur de Buñel, tous les films de Desplechin ou de Podalydès, des Doillon, des Lucas Belvaux, des Chantal Akerman. Je vais pouvoir faire une jolie cure de cinéma français, picorer ces films dont la tonalité m'intrigue. Même sans connaître tous ces réalisateurs, je sais qu'ils seront bien différents des quelques blockbusters américains que je peux siroter en version originale à Düsseldorf : oui, j'ai pris conscience que ce cinéma un peu exigeant et pas trop prévisible me manque.
Et que dire de l'absence de grande surprise dans mes vies littéraires et musicales ? Certes, depuis mon arrivée à Duisburg, j'ai goûté à d'agréables concerts, j'ai lu de jolies oeuvres. Mais ces dernières années, j'avais pris l'habitude d'une consommation intense de médiathèque : 2 ou 3 CD par semaine dans la médiathèque du Comité d'Entreprise, complétés par 1 ou 2 bande dessinées et des romans variés à la médiathèque municipale. Un roulement très différent de ma stable bibliothèque rueilloise, de ma constante collection de mp3 sur mon ordinateur. Voici revenu l'abondance !
Je sors dans la rue pavée près du marché et quitte l'Institut Français de Düsseldorf avec un sac bien rempli. Le DVD de Raja par Jacques Doillon, un joli duel de comédiens entre un homme à la condition aisée et une jeune marocaine orpheline. Deux classiques en bande dessinée, le troisième tome du Combat Ordinaire de Larcenet et le premier tome du Chat du Rabin de Sfar. Un roman que je voulais lire depuis longtemps, Rhésus d'Héléna Marienské, l'intrusion d'un singe dans une maison de retraite. Et un CD surprenant, le premier album du groupe de rap TTC, exquis assemblage de textes absurdes et de musique instable.
La collecte a été bonne, je reviendrai !