2008/01/01

n°1 - LCD Soundsystem, coup de foudre amical et hasard provoqué

N°1

Elle a cessé de croire au Prince Charmant, m'a dit cette année une amie de 35 ans.

Je suis tout à fait d'accord avec elle, pourtant, je pense encore et encore à ce disque. Je le repasse souvent sans aucune lassitude, avec le même émerveillement, une redécouverte à chaque fois, il est parfaitement séduisant, et j'y songe souvent dans la rue. Il n'y a pas de Prince Charmant, mais ce n'est pas incompatible avec l'existence de coups de foudre.

Hop, une soirée, et je partage un verre avec cette vieille connaissance. Léger embonpoint, style quelconque, en fait, je ne connais pas très bien ce type, j'ai retenu son style très personnel de danse une bière à la main, les deux ou trois blagues que j'ai pu entendre, plutôt amusantes. J'ai écouté son premier album, quelques uns de ses mixs, très agréables. Mais nous n'avons pas dû échanger plus de trois phrases, nous ne devons pas vraiment connaître nos noms de famille respectifs. Ou alors il a plus de mémoire que moi.

Ce soir-là, une soirée sympathique avec une jolie foule, et l'on s'est croisé, on papote accoudés à un mur, dans le passage, juste à côté de la porte des toilettes dont le verrou paraît si traître. On l'entend être tordu en tout sens, résistant, et celui qui finalement émerge affiche une mine à peine rassurée, pris au piège de longues minutes aux toilettes. Pas un choix délibéré de nous poster ici, mais c'est amusant, régulièrement, ces petites paniques, et cela laisse malgré tout le temps d'une agréable conversation. Un échange fluide où les sujets évoqués s'enchaînent sans problème, des opinions partagées sur l'amitié quand on vieillit, sur la mélancolie douce d'une rupture mais aussi sa si belle beauté triste. Et aussi tout son sens de l'humour, le rythme qu'il sait donner aux mots, mélange de distance et d'énergie, son regard sur la vie urbaine, sur les manières de faire la fête.

L'ambiance autour de nous résonne doucement de cette entente découverte, cette amitié évidente qui s'installe. Ces points communs font écho à certaines de mes préoccupations profondes, sentiments revenant régulièrement, ou même opinions inconscientes qui se révèlent ainsi. Découverte d'un ami tel qu'on en attendait un depuis longtemps, sans totalement le savoir, comme pour le hasard provoqué que présente André Breton dans l'Amour Fou : l'entente lors d'une rencontre n'est pas totalement fortuite, elle réveille des aspirations lointaines, parfois cachées. Tout s'assemble, un pur coup de foudre amical, cocktail de détails et d'attitude.

You spent the first five years trying to get with the plan,
and the next five years trying to be with your friends again.
Comment résister à ces paroles ? L'amitié d'abord, ou les projets, la famille à fonder, la carrière ? Et toute la puissance discrète d'un regard qu'il détourne en parlant, but where are your friends tonight ? Puis les sifflements, les petits coups, les mains dans lesquelles on frappe délicatement, tout doucement, le coeur encore gros en songeant à cette silhouette qui n'existe plus pour nous qu'en noir, the worst is all the lovely weather, I'm sad it's not raining. La joie de l'entendre baisser la voix pour une balade, ou répéter encore les mêmes syllabes dans son emportement, de découvrir ses blagues, ses synthés pas vraiment originaux, qui semblent parfaitement ajustés avec tout le reste, qui surgissent toujours magnifiques et me donnent le sourire. Je ne m'en lasse, je fait régulièrement mon délice de LCD Soundsystem et de son splendide Sound of Silver, et le sentiment devrait rester profond encore longtemps.

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