2007/12/11

n°16 - Soutenir modeste l'atmosphère d'un film

N°16

La musique enveloppante, diffuse, celle qui tisse l'atmosphère cotonneux où l'on s'embarque en rêve, et les notes coulent dans la tête, parfois, aux milieux de grandes émotions retenues, une musique d'ambiance intérieure, un délicat bourdon chantonné du fond de la gorge pour entendre la confirmation. Oui, ça arrive, et cela a lieu ainsi, je ne me trompe pas.

C'est ainsi qu'on rêverait les meilleures bandes originales de film. Un subtile soutient à l'émotion, une participation à la cohérence esthétique du film, évidente, mais discrète.

Hélas, combien de fois a-t-on droit à des hymnes lourds, pompiers, des bordées de cuivres pour soutenir les cavalcades effrénées de quelques chevaliers barbus, d'un aventurier à chapeau, d'un pilote de chasse ? Tant de tubes de BO nécessaires au packaging d'un bon blockbuster, à l'accroche immédiate de la bande-annonce seule, et qui font perdre de vue la délicatesse requise pour rester au service du film. Des sursauts de grands orchestre pour construire des clips dans le film, quand un rien peut déjà être de trop.

Mais parfois, ce rien se fait modeste, mais terriblement suggestif, un acteur tout entier de la puissance du film. Oui, souvent, il ne faut pas grand chose pour mettre en oeuvre une bande-originale marquante, et dans ces cas-là, on ne prend parfois conscience de cette présence musicale qu'au milieu du film. De petites interventions ponctuelles, pleines de justesse, des vagues de guitares en sanglot et échos, abstraits et électriques, voici le bel accompagnement du magnifique "Un homme perdu" de Danielle Arbid. Des instrumentaux doux, parfois à la manière de Neil Young dans Dead Man, toute une ambiance de perte lointaine, de ces ambiances réussies qui me baignent encore quand je marche longuement, au bord du canal, à la sortie du film.

Des musiques qui vous touchent aussitôt, sans en rajouter, et vous toucheront sur la durée, chaque fois qu'elle reviendront, véhiculant les émotions et les sentiments manipulés par le film. L'adolescence, le spleen des bourgeonnant sentimentaux, de schémas qu'on ne maîtrisent mais qui paraissent si profond, l'absolu du sentiment naissant dont on ne sait quoi faire. La naissance des pieuvres. Premier film de Cécile Sciamma, évocation toute en finesse d'adolescentes perdues dans leur désir qui se révèle, le mutisme, les disputes, les papotes, et, merveilleuse trouvaille, la musique flotte magnifique et fascinante. Doucement électronique, musique minimale aux accents de musique d'ambiance, Para One a su tisser un écrin magnifique pour les belles images et les superbes comédiennes.

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