Le CD, marchandise à la magie bradée
Vendredi soir, passage au Virgin Megastore des Champs-Elysées
1500 CD à 6,99€ !
Des étalages cartonnés à rayures vertes et roses, éparpillés dans les allées sans classement. Standards de jazz face à la variété françaises, les auteurs sans ordre, sans époque, tout distribué, des blocs cartonnés temporaires ajoutés dans les allées, médiocres stands épars où tout est vendu aux quatre vents pour le prix d'un single.
Tant de titres, un tarif si dérisoire. Des albums riches et profonds, inépuisables, pour le prix d'un hamburger et d'une grande frite. Tonight's the night et Harvest de Neil Young, Forever Changes de Love, Unknown Pleasure et Closer de Joy Division, Fun House des Stooges, Ocean Rain, Seventeen Seconds des Cure, The Velvet Underground and Nico, XO d'Eliott Smith, Live at Leeds des Who, Vespertine de Bjork, Berlin de Lou Reed, New York 1919 de John Cale, Different Class de Pulp, les albums solo de Scott Walker, The Ideal Crash de dEUS, Station to Station et Ziggy Stardust de David Bowie, LCD Soundsystem : poser son regard sur n'importe quel étalage discount en carton, et être saisi par un album majeur de l'histoire de rock. Une foule d'échappés des tops 250 de tous les temps.
Et personne ne semblait surpris. Cette grande musique populaire comme tombée du camion, les gens ne réagissaient pas.
J'ai eu mal à l'industrie musicale.
Pourtant, une grande partie de ma collection de disques est constituée d'exemplaires en promotion. Berlin, The Velvet Underground, Joy Division, My Bloody Valentine, Eliott Smith, Come on feel the Illinoise de Sufjan Stevens, achetés neufs tarif démarque. Mais plutôt autour de 10€, au milieu d'un choix d'à peine une centaine de titres, réduits exceptionnellement : sensation de faire une bonne affaire, d'avoir déniché une pépite isolée, d'avoir su être réactif. Pas de servir à délester des stocks de 1500 références.
Des bouts de plastiques, trop d'abondance, ouvrez les caisses sans même sortir des cartons, et le consommateur se servira dans la palette.
Vendredi, les CD m'ont semblé laids.
Dix jours plus tôt, je parcourais des stocks de vinyles sur les stands des jeudis de Nîmes. Larges étuis cartonnés et fins, au format étrange pour l'auditeur du XXIème siècle. Live at Leeds des Who vibrait dans sa pochette sous mes doigts, le meilleur live rock de tous les temps peut-être, sans photo sur sa couverture, juste une couleur beige, et son charme était magnifique.
Je vais finir par m'acheter une platine vinyle.
Promenade à Gibert en juin, et fouiller dans les bacs à vyniles, leur grande taille muystérieuse, leur douceur, et passer la main encore et encore sur la couverture d'Eraser de Tom York, ses lignes noires en surépaisseur sur fond blancs, la présence de l'objet, son caractère.
Retrouver cette séduction dans l'album Hollinndagain, live d'Animal Collective, réédition CD d'un album vynil publié à 300 exemplaires. Le CD se présente comme un emballage de vynile en miniature, cartonnée, dépliable, le CD est présenté dans une fine pochette en plastique. Savoir prendre le temps de concevoir un joli CD, pas simplement une ligne de milliers de boîtes plastiques qui casseront au premier transport, car il y a du plaisir à approcher d'un tel objet, à l'apprivoiser, à explorer les présentoirs d'une boutique à échelle d'amateur de musique.
Un disquaire, un vrai, comme celui parcouru en mai à New York.
Boutique de petite taille, ouvrant à midi seulement. Des tracts face à l'entrée, ribambelles de flyers, pour un peu partout en ville, certainement. Dans les rayons, es intercallaires désignant les artistes ont été écrites à la main, marqueur noir, avec des ruses pour les noms longs, comme une symbole de coeur, ou des commentaires, pour Siouxsie. Au dessus de la caisse, ardoise veleda proposant les concerts en réservation, bruns, noir, !!! le 31 mai à $17. Les CD d'occasion, les used, glissés sous blisters épais fermés à la main avec du ruban adhésif. L'esprit Virgin est loin.
Et les hauts-parleurs diffusent une musique mystérieus, certainement pas une nouveauté, un trésor caché, assurément. La passion, la passion dans les petites notes de présentation, une douzaine de lignes au moins en faible police, encore rétrécie quand il y a plus à dire, des notices souriant en parsemant les critiques de référence indépendantes, chefs d'oeuvres n'ayant parfois même pas un an, vivants, des notices chuchotées à l'oreille après avoir posé la main sur l'épaule du client.
Le rayon used est étonnament dense sans fausse note, pas de stocks énormes de gros vendeurs, le seul disque d'occasion présent est un Pavement.
La sélection des nouveautés articulent des goûts sûrs, Animal Collective, The Field, LCD Soundystem, Panda Bear, Bright Eyes, Menomena, TV on the Radio, Peter Bjorn and John, Xiu Xiu, et les gros vendeurs indépendants sont aussi présents sans notice, ils n'en ont pas besoin, Arcade Fire, Arctic Monkeys.
Certainement quelques perles rares éparpillées, Brigitte Bardot, de la pop japonaise, un rayon Then Music débutant par A Certain Ratio, un gros rayon Psychedilic & Krautrock.
Superbe mur de vyniles affichés au mur, avec même des occasions, des singles rares.
Les deux vendeurs roux n'étaient peut-être pas les anges d'Other Music, mais je ne les oublierai pas.
Tellement loin des 1500 références à 6.99€.
Vendredi, je suis tout de même reparti avec Ziggy Stardust et LCD Soundsystem, qui restent de grands disques. Et, leur individualité retrouvée loin des présentoirs d'Ed l'épicier, les pochettes sont redevenues belles.
1 commentaire:
Tu le veux ce vinyl des Who ? Je passe demain devant l'étalage ...
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