L'immense porte aux tuiles vertes typiques marquent l'entrée de Chinatown. De la même manière qu'à Washington DC ou Londres ; je l'avoue, je ne me rappelle pas d'équivalent à New York, mais le Chinatown newyorkais est si grand qu'il est difficile d'en tracer les limites... A San Francisco, le quartier chinois est assez vaste mais suit essentiellement une ou deux rues, une longue bande sur de nombreux blocs. Aucune difficulté pour en repérer l'entrée et s'y glisser doucement.
D'autant que ce dimanche, les voitures s'amoncellent sous le porche asiatique, certaines se risquant même à klaxonner ; pourtant, la circulation de San Francisco m'a paru bien plus apaisée que celle de New York où les chauffeurs de taxi semblent astreints à klaxonner toutes les dix minutes.
Mais ce micro bouchon n'était pas un effet direct de l'atmosphère chinoise, les automobilistes ne se sentent pas pris soudain d'une irrépressible envie d'agressivité au passage de la frontière symbolique. La route se trouvait bloquée par la fourrière, occupée à déloger une voiture mal garée, ou qui n'avait pas respectée les conditions de stationnement. Il faut savoir que celles-ci sont extrêmement strictes dans San Francisco, généralement restreintes à deux heure, un peu à la manière de nos zones bleues ; mon guide touristique conseillait d'ailleurs la prudence aux visiteurs n'ayant pas l'habitude, en insistant sur la promptitude de la fourrière. Il faut dire que les rues de la ville sont bien étroites pour les standards américains et qu'elles n'autorisent aucun laisser-aller dans le respect des règles.
Cette scène illustrait donc à merveille la réputation de la ville en matière de stationnement, et j'avoue avoir ressenti un peu d'inquiétude quant à ma voiture de location, abandonnée dans non loin de la sortie de l'autoroute. Dans une place valable, certes. Ma nervosité d'automobiliste expatrié m'avait même poussé à interroger un piéton, pour m'assurer de ma bonne compréhension des panneaux de stationnement et de leurs multiples clauses...
Pour noyer ces quelques angoisses nourries des neuf heures de jetlag de la veille, je m'amusais donc à observer la scène, plutôt amusante. Une large police-woman noire laissait éclater son rire sonore pour amadouer les automobilistes malchanceux ; les derniers de la file tentaient d'ailleurs d'enclencher la marche arrière, ne voulant pas arriver en retard au déjeuner dominical. Deux immenses girafes se tenaient nonchalantes sur le trottoir, exposées par un magasin d'antiquité aux pièces magnifiquement kitsch. Des girafes dans une rue en pente embouteillée, voilà une photo originale capturant un instant de vie, une superposition de deux champs qui m'amuse ; un touriste a observé intrigué mon cadrage, puis s'est positionné pour prendre également les deux animaux aux longs cous.