2007/07/07

Flèche d'Or le vendredi 06 juillet

A 19h30 sur le quai du métro 2 à Nation, un barbu avec un étui à guitare dans le dos, une jeune fille avec des béquilles et un garçon dont le pantalon noir affiche des motifs blanc façon craie. Public apparent d'un concert rock, et, arrivés à la station Alexandre-Dumas, ils remontent la rue de Bagnolet vers la Flèche d'Or, comme présupposé intuitivement.

Au 102 bis, quelques personnes attendent devant la Flèche, il n'est pas encore 20h. Il est possible d'acheter un Saint Christin dans une boulangerie au carrefour le plus proche, mais il n'est pas possible de rentrer avec. Consommation boulangère en extérieur obligatoire, et de même, les sacs doivent rester en garderie à la consigne de l'entrée pour deux euros.

Mais c'est là le seul prix d'entrée pour une soirée proposant quatre concerts et une soirée de danse après minuit.

Dans un cadre à la jolie personnalité. Devant, des tables en extérieurs s'éparpillent sur un tapis d'herbe en plastique. A l'intérieur, canapé en cuir rose pour quatre personnes devant un rideau rouge tiré, un espace pour la musique tout en largeur, et un Apollon doré survole de son char des divans dans une verrière, tournant le dos à la voie ferrée qui surgit de sous le plancher. Le rideau se tire manuellement et révèle la scène soutenue par un épais cadre or, soutien théâtral et artistique pour les groupes en tableau vivant.

Le premier groupe est duo, guitariste samplant ses petites phrases musicales, et batteur avec un masque de crâne sur l'arrière du crâne, tenant une baguette dans la main gauche et un maracas orange dans la droite. Des visages en cartons éparpillés sur les instruments, Ringo Starr moustachu, Robert Smith et Prince, ils regardent le public en écoutant les reprises lancinantes de leurs titres.

Puis les O'Death lance l'enchaînement de groupes américains. Un groupe campagnard de New York, batteur torse nu au fond et une ligne de quatre personnages pittoresques devant lui. Un batteur au ventre nu, dépassant son pantalon bas, rondeur houblonnée, il porte barbe blonde hirsute et cheveux longs et sales. Il les attachera au milieu du concert. Un violoniste assis à ses côtés, calvitie bientôt naissante et polo aux rayures rouges et vertes horizontales, et son archer s'effiloche rapidement dans l'énergie des va et vient. Une guitare acoustique soutient le chant clair du troisième à l'épaisse barbe noire, chant presque aigu pour un feu de camp romantique. Le dernier de la rangée est également barbu, aux joues moins fournies en blondeur, et le genou droit de son jean s'ouvre généreusement. Il gratte l'ukélé électrique ou le banjo, regard froncé derrière ses lunettes.
Le chant s'envole léger au son de la guitare, puis l'énergie de chaque morceau déborde et s'envole trop fort, tous les musiciens se lèvent soudain, et tous chantent, même loin des micro, et les mains battent au rythme des pieds du public. Ils quittent la scène dans un gospel paillard a capella.

Le rideau s'ouvre ensuite sur les Dirty Projectors, guitariste gaucher ébouriffé entouré de deux filles pas très grandes avec une basse Paul McCartney et une guitare, deux filles que l'on croise dans chaque classe de seconde, jean noir et T-shirt gris sous cheveux bruns mi-courts, jean bleu et débardeur tricolore pour supporter les nattes.
La main droite glisse et picore le manche en petites notes éparses, offertes en mélodies miniatures, et presque aigrelettes pour certaines. Puis le guitariste lance la chanson après un regard à chacun dans le groupe, voix claire pour chant non linéaire, aux montées par moment lyriques, et parfois, les filles se glissent vocalement à ses côtés, douces poussées aiguës, des choeurs légers entre deux parcours électriques de la scène en hochant la tête, possédé. Superbe numéro de présence, de charisme et d'atmosphère.

Et enfin, Menomena, le plus grand groupe de 2008, comme l'on dit les deux lycéennes faisant la queue aux toilettes. Un trio, quel trio, juvénile et tous sur la même ligne. Batteur sur la droite, biceps tendus et coupe Beattles, un ventilateur chromé à ses pieds. Bassiste saxophoniste au centre, cheveux longs, bouclés et blonds avec barbe, et une chemise à carreaux beige, il pianote du pied sur un orgue Moog. Et le guitariste clavier sur la gauche, cheveux blonds et courts, et le couvercle de son laptop gris affiche un coeur aux côtés du xylophone en plastique bleu. Les deux guitaristes portent les mêmes chaussures en toile bleu marine à semelle blanche, mais les lacets du bassiste sont blancs.

Les chansons de l'album Friend and Foe se déploient dans leur grandeur moderne. Batterie puissante mais aux motifs complexes, sans longs rythmes monotones et simplement rapides. Motifs de saxophone, de claviers, d'une basse ronde, d'une guitare simple, et parfois, en fin de morceau, la puissance déborde, guitare saturée et abondance de cymbale percutée. Tous chantent tour à tour, parfois ensemble, la force des voix mélangés dans tant de rock moderne ambitieux, entrelacs dosés, mais libres sur scène, à la manière du rappel étendu comme une jam jazz.
Cela méritait bien un T-shirt illustré par les fantastiques dessins de Craig Thompson.


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