2007/09/01

Tony Wilson died

Vous souviendrez-vous où vous vous trouviez quand vous avez appris la nouvelle de la mort de Tony Wilson ?

C'est troublant à dire, mais je pense que je m'en souviendrai, pour ma part. Une salle informatique au coeur du Magdalen College d'Oxford, escapade express sur Internet, la seule en une semaine, et , par hasard, découvrir cette info.

Tony Wilson, mort à 57 ans.
C'est troublant d'avoir été touché, car, si j'ai une certaine fascination pour Tony Wilson, c'est comme d'un personnage, pas vraiment réel, une figure entourée d'une petite légende musicale, riche en anecdotes étonnantes, amusantes. Le superbe personnage principal du film 24 hours party people.

En 1976, Tony Wilson est présentateur sur Granada TV, chaîne régionale de Manchester. Il se rend au concert des Sex Pistols, leur premier concert à Manchester. Ebloui, il leur offre leur premier passage télévisé, puis, peu de temps après, Tony Wilson fonde la maison de disques Factory Records.

Le premier single de Factory Records est le premier single du groupe Joy Division. Les Joy Division se sont également rencontrés à ce concert des Sex Pystols, et vont devenir le symbole de Factory Records. Groupe à la personnalité tourmentée, remplis d'hétérogénéités internes, entre trois musiciens jeunes, insouciants et buveurs de bière, et un chanteur troublé, épileptique, suicidaire, à moitié néo-nazi. Joy Division, c'était le nom de bordels où étaient placées des femmes juives dans les camps de concentration. Jeunesse ouvrière, démarche artistique entre pop, avant garde et presque mauvais goût, voici un des aspects de Factory Records.

"Shaun Ryder dans un bon jour, c'est presque du Yeats dans un jour moyen", dit Tony Wilson du chanteur des Happy Mondays, groupe drogué sorti des banlieues de Manchester au milieu des années 80. Et tout est presque résumé ainsi.

Tirer le rock vers plus d'art, tout en lui conservant son énergie, sa puissance, sa dangerosité, ce frisson d'excitation et d'immédiateté. Factory Records, au début des années 80, c'est ainsi les pochettes de Peter Saville, dépouillées et avant-gardistes, les arpèges douces du Durutti Column, le premier single d'OMD, ou encore le punk dansant d'A Certain Ratio, au son toujours moderne.

Mais, bien entendu, je ne parlerai pas de Tony Wilson s'il n'y avait pas eu le duo Joy Division / New Order. Joy Division a quitté peu à peu le punk pour une musique plus dense, fascinante, terrible, quand le chanteur Ian Curtis se pend, à 21 ans. Les membres restants fondent New Order, se cherchent un peu, puis trouvent leur son, un des joyaux des années 80, une voix instable, des lignes de basse magique et du synthé en quelques notes. Blue Monday en 1983 est une étape essentielle dans la dance music anglaise.

Car la suite de Factory Records sera toujours plus dansante. Tony Wilson fonde la Hacienda, club clé dans la club culture anglaise naissante. New Order puis l'acid House s'élanceront de là-bas, et Laurent Garnier y verra naître sa renommée en petit frenchy des lieux. Par la suite, Tony Wilson aidera à lancer la vague de Madchester avec les Happy Mondays, du rock et de la dance sans être spécifiquement l'un ou l'autre, surtout une grosse déconne. Bez n'est d'ailleurs là que pour danser sur scène maracas à la main et pour fournir de la drogue.

Mais, par délà les listes de pseudo historiens du rock, bien plus que cette musique et ces vidéos, Tony Wilson est une mine à anecdotes presque inimaginables. Il rédige de son sang le contrat qu'il signe avec Joy Division, et d'ailleurs, pour être cohérent avec son goût du socialisme, il n'impose aucun contrat strict à ces artistes : 50% des bénéfices pour les artistes, 50% pour Factory Records, mais aucune contrainte de disques, les groupes peuvent partir quand ils veulent...

Mais le plus fort, c'est à nouveau Blue Monday, diffusé dans une pochette en forme de disquette, ode au futur en 1983. Cela justifie largement le fait de vendre le disque à perte. Dommage, Blue Monday sera le maxi 12' le plus vendu de tous les temps en Angleterre...

Alors, même si, logiquement, Factory Records s'est écroulée sous les problèmes financiers au début des années 90, on ne peut avoir que de la tendresse pour Tony Wilson et son sens de la beauté du geste.

1 commentaire:

Robin LE WILLIAM-NORTH a dit…

Un joli mix en hommage à Tony Wilson, sur BBC Radio One :
http://poundforpound.blogspot.com/2007/08/essential-mix-celebrating-tony-wilson.html

Du Joy Division, du New Order, A Certain Ratio, Happy Mondays dans la première heure.

Puis une deuxième heure dancefloor, comme à la Hacienda !