2008/02/10

Un samedi polyglotte sur Duisburg (donde se habla español tambien)

- Hablais Español ?
Mon camarade colombien se penche dans l'embrasure de la porte. La réponse est positive, il me fait signe de le suivre rejoindre ce groupe hispanohablante. Dernière étape d'un samedi particulièrement international et polyglotte, enchaînant les surprises.

Pourtant, le matin, mon samedi s'annonçait uniquement sous le signe de l'anglais et du français. Anglais, ma langue de survie, afin d'évoluer en Allemagne avec derrière soi moins d'une demi douzaine de cours dans la langue de Goeth. Si, au fur et à mesure, les petites expressions utiles s'ajoutent les unes aux autres, il me faut souvent bifurquer vers l'anglais à ma deuxième ou troisième phrase dans un café. Mes commandes bancales en allemand donnent confiance aux serveurs, et il me faut alors battre en retraite après leurs réponses trop rapides et trop germanophones. Rien de très grave, il faut faire profil bas !

Toutefois, je comptais ajouter à cet anglais utilitaire une petite conversation avec une française. Elle avait été élève très temporaire de mon cours d'allemand, avant de partir pour Bonn après une seule leçon, mais devait passer le week-end sur Duisburg. Une bonne occasion de boire un café entre français, autour de ce seul prétexte, discuter en français une heure ou deux, au coeur d'un long séjour à bredouiller en anglais et ne pas comprendre l'allemand. Peut-être n'aurait-on rien à se dire, qu'importe, le contenu ne comptait pas vraiment. Au pire, on aurait parlé de Sarkozy. Rendez-vous avait été pris par téléphone en deux phrases francophones, mais l'échange bleu-blanc-rouge devra finalement attendre un week-end prochain, puisqu'elle s'est décommandée au dernier moment, vraiment débordée. L'un dans l'autre, contrat presque rempli, une douce expérience de la France : verra-t-on jamais un de ces si gentils Allemands annuler un rendez-vous au dernier moment ?

De toute façon, ce léger contretemps ne me condamnait pas à une fin de journée solitaire. J'avais déjà prévu de me rendre à la célébration du Nouvel An chinois, organisée par des étudiants de l'université au Centre International. 18h, les gobelets en plastique s'étalent près de la cafétéria, faisant face à une table couverte de prospectus Best Western, sponsor apparent de l'événement. Une jeune fille m'épingle une fleur en papier rouge, porteur de bonne chance pour la bonne année, et me voici assis à une petite table, sans avoir osé lire le prénom de cette fille sur son badge illisible : lettres imprimées à l'ordinateur, c'est pro, mais peut-on décemment déchiffrer un badge fixé au sommet d'une poitrine féminine ? Pourtant, malgré le retard de mon camarade colombien, pas le temps de m'ennuyer. Je partage un gobelet de mousseux et des nougats chinois avec un sympathique étudiant chinois qui m'a pris en amitié, a noté mon adresse électronique, ravi que je lui pose des questions sur la langue chinoise. Gambei, nous trinquons, et ça y est, j'ai presque autant parlé chinois que français aujourd'hui...

Quelques instants plus tard,un nouveau continent vient à ma rencontre quand arrive ce camarade colombien, qui me trouve fasciné par le karaoké chinois. Mon nouvel ami chinois est parti servir du mousseux, portant un plateau peu horizontal, après avoir proclamé plusieurs fois son ivresse, plutôt évidente, et je me suis faufilé dans la plus grande salle de la fête. Une quinzaine de tables sont entourées d'étudiants chinois, groupe fourni mais qui représente finalement une faible portion des 500 élèves venus de Chine pour étudier à Duisburg. Ils n'ont aucun problème pour suivre les paroles de pop chinoise qui défilent à l'écran, et je suis triste de ne pouvoir participer plus activement à la fête. N'y a-t-il pas des karaokés chinois écrits en phonétiques ?

Mon ami sud-américain efface aussitôt cette déception : à l'entrée du Centre International, une feuille manuscrite évoque un groupe "Latina America & Bresil", apparemment en réunion au deuxième étage. Nous montons, mon ami entrouvre la porte, pour voir, et aussitôt, nous voici plongeant définitivement dans ce troisième continent. Pendant que l'Asie célèbre le début d'année à grand renfort de chansons romantiques, l'Amérique du Sud tient sa réunion hebdomadaire au deuxième étage. Dernière étape surprise du jour !

Dans la salle, là-même où ont lieu nos cours d'allemand, cinq femmes aux longs cheveux très bruns grignotent des biscuits apéritifs en discutant. Un homme chauve à la barbe blanche complète le tableau, avec une fillette qui dessine aux feutres ou joue à la bataille avec sa maman. Voici le groupe des ressortissants sud-américains de Duisburg, je tente de retrouver mes souvenirs d'espagnol datant de plus de trois ans, et je m'assois auprès de l'homme. Il est allemand, mais a vécu 15 ans en Espagne, 3 ans au Vénézuela et 2 ans en Colombie, par l'intermédiaire de sa formation de chimiste, et son espagnol s'écoule d'une fluidité parfaite. La conversation passe parfois de l'espagnol au portugais, une des femmes est Brésilienne, et mon ami est ravi. Il parle beaucoup, et je m'enivre de cette nouvelle langue de Duisburg, l'espagnol, surpris de la comprendre sans trop de problème. Quant à parler, cela reviendra avec le temps : nous inscrivons nos noms sur une liste, et hop, nous serons tous deux de la partie pour les journées de présentation du Brésil et de la Colombie !

La bobine de l'immersion internationale commence à peine à se dérouler...

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